Stanley Greene, des vies, une mort

Grozny, Tchétchénie, 1996 © Stanley Greene
Vous l'avez peut-être croisé à Beyrouth ces dernières années sans le savoir. Stanley Greene ne passait pas inaperçu avec son béret ou son bandana sur la tête, son look de rocker, ses lunettes de soleil et sa peau sombre. Ce joyeux bonhomme de 68 ans, témoin des nombreux soubresauts de l'histoire contemporaine, est passé de la lumière à l'ombre ce 19 mai.

Afro-américain né aux états-Unis en 1949, il a d'abord, adolescent, milité avec les Black Panthers et contre la guerre du Viêtnam. Il s'est ensuite intéressé à la scène punk de San Fransisco dans les années 70 puis a été introduit par Eugène Smith – qui l'a pris sous son aile comme assistant – à la photographie de mode.

Il s'installe enfin à Paris en 1986 et commence, presque tardivement, à travailler dans le photo-journalisme. Sa carrière, dans le domaine, démarre réellement en 1989, à la chute du mur de Berlin. Il se plonge alors dans les nombreux événements qui se succèdent lors de ce tournant majeur de l'histoire contemporaine. Devenu membre de l'agence VU en 1991, il est basé à Moscou dès 1993 et couvre l'actualité pour les grands médias de la presse internationnale. Il sera le témoin privilégié – car de l'intérieur, et seul photographe occidental – du siège de la Maison blanche dans l'ex-capitale soviétique lors de la tentative de faire chuter le président Boris Yeltsin. Deux de ses images seront récompensées par le prix World Press.

Stanley Greene poursuit ses reportages de terrain, en particulier pour le défunt magazine français Globe Hebdo (1993-1994). Il parcourt les conflits de la planète de la fin du XXe et du début du XXIe siècles, dont ceux de la Tchétchénie. Membre fondateur de l'agence Noor, sa carrière a été largement honorée de prix divers.

On retiendra pour notre part cette image fantomatique prise à Grozny en 1996. Dans une friche urbaine enneigée, la trace d'un corps. La mort est récente mais le corps, qui a été trainé, n'est plus là. La neige n'a pas encore recouvert sa trace. Noir et blanc. Présence et absence. Vie et mort.

Alexandre Medawar

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